On va consacrer cet article au calcul de vos futurs tarifs et la rentabilité de votre entreprise de photographe. Du moins je vais vous donner comme toujours des pistes de réflexion, nullement une solution toute faite.

S’installer comme photographe c’est le rêve de beaucoup. Je ne vais pas ici m’adresser à des gens qui vont me sortir que de toute manière ils ont toujours eu un appareil photo dans les mains, que c’est leur famille et les amis qui leurs ont dit qu’ils avaient un talent fou etc etc. Désolé je commence avec brusquerie mais ces personnes-là poseront (souvent) la question 50 fois sur les réseaux à 50 endroits différents et au final feront ce que bon leur semble sans tenir compte des conseils prodigués (vu, vécu, et usé de jouer les pédagogues). Oui je sais je ne suis pas sympa.

Je vais m’adresser ici aux futurs photographes professionnels, qui ont initié une réelle démarche de réflexion, de recherche. Ils se documentent, s’informent se forment et mesurent l’étendue et la complexité de ce choix d’aventure. Bien que comme je l’ai déjà abordé, l’installation en micro entreprise soit très à la mode du fait de sa rapidité de création et sa souplesse de gestion il n’empêche qu’il faut réellement réfléchir à son projet et réfléchir au…budget.

Photographe : Activité principale ou secondaire

En fonction du type d’activité principale ou secondaire vous aurez des attentes différentes en termes de somme restante à la fin du mois. L’un va chercher un salaire complet l’autre un complément. Mais chacun aura forcément un temps dédié à cette activité plus importante que l’autre. Et le budget de fonctionnement de l’entreprise sera identique. Donc ne vous mettez pas bille en tête en vous disant que vu que c’est secondaire pas besoin de se tracasser de trop pour faire ses tarifs.

Vous allez vite voir que les dépenses incompressibles représentent un chiffre important… Et que le travail de qualité conserve une valeur minimale quelle que soit le type d’activité. Donc non ce n’est pas parce que l’on fait ça « juste » les week-ends que ça doit faire tirer vos tarifs sur la marge basse.

Un budget perso c’est une chose mais un budget d’entreprise c’en est une autre. Sur l’article dédié à comment s’installer comme photographe professionnel j’abordais la notion de budget de fonctionnement. Ce budget comporte donc les diverses dépenses incompressibles d’un photographe.

Je vous propose de reprendre la liste et d’y attribuer une valeur mensuelle. Cette valeur n’est pas une référence sacrée car en fonction de-vous de votre région, de vos prestataires ça peut évoluer. Donc encore une fois ces chiffres sont bateau.

Le budget de fonctionnement d’une entreprise de photographie

Donc on va partir sur un budget mensuel de fonctionnement pour un photographe qui débute en photo canine, équine avec un équipement de départ amorti ou du moins non présent dans ce budget. Cette entreprise n’a pas de local en dehors d’un coin de bureau et travaille donc au domicile de ses clients, écuries ou sur les terrains de concours sans tirages réalisables sur place.

Evaluation de l’investissement du pack de départ pour débuter son activité

  • Un boitier neuf : 1500-2000 €
  • Un boitier back up (secours) : 1000€
  • Deux optiques : 2000 €
  • Sac photo : 100€
  • Cartes mémoire (2/3): 100€
  • Informatique (PC + NAS) : 2000€

Total investissement : 6600€ en moyenne. Le chiffre peut être ramené à un tarif haut/bas Il est juste là à titre indicatif mais sur une fourchette assez réaliste.

Budget de fonctionnement mensuel 

  • Budget photo (amortissement sur 5 ans) : 100€
  • Budget photo accessoires (studio, réparation etc) : 50€
  • Budget informatique (amortissement sur 5 ans) : 40€
  • Licences logiciels (Adobe + Lumys + Fotostudio) : 50€
  • Assurance RC pro : 20€
  • Médiateur : 10€
  • Dépense auto (entretien) : 70€
  • Téléphonie : 30€
  • Site Web (hébergement + domaine si par ex site géré par une plateforme type square space) : 20€
  • Provision pour CFE (avec une base de 250€ annuelle ) : 20€

Total mensuel : environ 400€


J’inclus une provision pour le paiement de la Cotisation Foncière des Entreprises avec une base de 240€ annuelle. Pour trouver le chiffre moyen se référer au barème de votre commune d’installation.

Comme vous l’avez constaté je ne compte pas de local, je n’inclus pas l’achat du véhicule mais j’ai comptabilisé l’entretien (mensualisé) mais pas le carburant. Certains esprits plus avisés pourront me reprendre sur bien des postes de dépenses mais le but ici est de vous présenter une ébauche grossière pour illustrer. Ce n’est PAS une simulation réaliste. Et c’est votre job de chiffrer les dépenses !

Ce budget de +/- 400€ il va donc falloir l’intégrer dans le calcul de votre tarif. Forcément il va falloir amortir.

Définir le « salaire » mensuel que l’on souhaite comme photographe

Pour faire au plus simple on va parler de « salaire » ça parlera à tous. Chaque mois vous souhaiterez donc dégager une somme dédiée à votre « salaire ». Cette somme représente donc ce que vous souhaitez gagner après abattement des charges sociales et celles de  votre budget de fonctionnement. Pour vivre et payer vos factures perso (alimentaire etc) ou pour ajouter au salaire de votre activité principale.

On va se dire que je souhaite dégager 1500€ de Chiffre d’Affaire (ici on va considérer ça comme le salaire) par mois net de toute charges. Donc sur 1500€ qu’il nous reste (j’ai bien dit IL RESTE) il va donc falloir gagner au minimum 22% de plus (taux de charges sociales pour un micro entrepreneur) ce qui amène à (j’arrondis) à 1900€.

Sur ces 1900€  charges sociales incluses on va ajouter le budget de fonctionnement (ici 400€). Donc on arrive à un chiffre de 2300€.

  • Chiffre d’Affaire (net de charges) avant impôt : 1500€
  • Charges sociales à déduire (taux de 22% en AE) basé sur le CA net de charge : 400€
  • Budget de fonctionnement : 400 €

Total de CA à réaliser mensuellement : 2300€ (impôts non déduits)

Je n’aborderais pas la partie impôt, d’une je ne suis pas comptable et de deux suivant les options choisies vous n’aurez pas les mêmes configurations. Donc pas les mêmes sommes. Le « salaire » de 1500€ mensuel est donc avant impôt.

Définir le temps passé par séance pour trouver le tarif adapté d’une séance photo

Avant de pouvoir définir le tarif d’une séance vous allez devoir chiffre le temps consacré à cette même séance photo. On part donc sur une base à personnaliser.

  • Echange avec le client (mail, téléphone etc) : 1h
  • Trajet  A+R: 1h
  • Séance photo : 1h
  • Tri, traitement et retouches de la séance : 4h
  • Galerie et envois des fichiers, archivages : 1h

Total du temps consacré à une séance : 8h

Prenons l’exemple d’une séance photo à 150€

Donc si je veux dégager un Chiffre d’affaire de 2300 € il va falloir que je travaille : 2300/150 : 16 séances. Je dois donc effectuer mensuellement 16 séances donc consacrer 128h de travail. Mais si je ramène mon chiffre d’affaire au taux horaire après abattement de mes charges et de mon budget de fonctionnement :

1500€/128h : 12€  C’est la somme nette avant impôts que je vais gagner au taux horaire après avoir enlevé toutes mes dépenses de fonctionnement. Je rappelle que le SMIC horaire est aux alentours de 9/10€… Juste comme ça histoire de vous donner un point de comparaison. C’est donc une valeur assez faible.

A vous de juger ensuite si cette somme est à la hauteur du travail que vous produisez. En sachant que sur ces 128h consacrées aux séances je n’ai pas comptabilisé les heures passées à :

  • La comptabilité et la gestion administrative
  • Le temps consacré à faire les mises à jour de votre site web (galeries etc)
  • Le temps consacré aux réseaux sociaux (recherches de prospect, mise à jour de galerie, échanges avec vos abonnés), au référencement de votre site, publication de pub et autres.
  • Le temps consacré à répondre aux demandes de prestations (devis)

Toujours aussi « cool » de devenir « pro » ?

En micro entreprise de photographie : les supports et tirages

Si vous suivez le modèle de micro entreprise en artisanat de photographie sachez une chose importante : les supports que vous allez acheter, les tirages que vous allez commander ou réaliser seront imposées en prestation de service. Et non pas en ventes de marchandises. Cette dernière ligne ne fonctionne qu’en cas de revente de produits non transformés comme par exemple acheter un cadre et le revendre tel quel  à votre client ou encore un album vierge.

Dès lors que vous allez commander un album avec des photos réalisées par vos soins (un livre par exemple), des tirages issus de vos séances c’est considéré comme une prestation de service. Donc sur votre prix d’achat vous allez devoir répercuter vos charges et… le temps passé.

Donc un tableau PVC à 150e prix d’achat fournisseur frais de port inclus. Il va donc falloir amortir aussi le temps passé dessus.

Si par exemple j’ai passé 2 heures sur le produit je vais appliquer un taux horaire donc ici pour notre exemple 24€ : 150 + 24 = 174€ et si j’y ajoute mes charges : 174 x 22% : 220€ (j’ai arrondis) avec charges URSAFF incluses. Ce chiffre sera le coût total du produit pour le client.

Je ferais abstraction de la TVA sur le produit acheté au fournisseur vu que vous ne la récupérez pas. Et aussi sur le faible gain pour vous sauf si vous révisez votre marge bénéficiaire à la hausse.

Comme vous le constatez la micro entreprise a bien des avantages mais aussi de gros inconvénients sur les charges sociales qui s’appliquent sur le tarif de déplacement (revoir l’article) ou… les produits finis. D’où l’importance de bien calculer TOUT avant et de définir la liste de produit, le temps moyen à y consacrer et le prix de revente final.

Ne pas négliger ses tarifs

Vous l’avez bien compris vendre des shoots à 50 balles ce n’est pas rentable. Et oui 50€ – 22% = 39€ ramené à l’heure 39/8=5€ !!! Waw 5 euros de l’heure avec un smic à 10 €… Donc clairement pas du tout rentable. Et ne venez pas me dire que ce n’est pas grave, que vous avez déjà du matériel. Ce matériel vous allez devoir le renouveler plus souvent donc épargner donc dégager du chiffre pour vous équiper.

Pour rappel vos compétences ne sont pas le budget de votre client. Votre tarif de photographe est de x €, si votre client vous choisit il règle cette somme. On ne fait pas une séance photo parce que le client a décidé qu’il n’aurait que x € à dédier à cette dépense. Quand je vais à la boulangerie j’achète du pain et je paye le prix indiqué sinon je ne vais pas acheter de pain. On appelle ça la rentabilité.

Ne pas négliger ses compétences

Comme vous l’avez vu le prix d’une séance photo dite « rentable » requiert une somme qui peut vite représenter un budget conséquent. Vendre une prestation tarifée de ce type à un client va alors nécessiter de justifier la prestation par un travail « professionnel » et non plus amateur. Je parle là de qualité intrinsèque du travail fourni. Le travail dit « amateur » est volontairement péjoratif, ne se rapporte donc pas à la qualité du photographe (passionné ou pro) mais bien à l’amateurisme du travail fourni.

Ceux qui pensent que 6 mois de pratique photo font d’eux des techniciens accomplis, parce que sur leur groupe de discussion ou encore leur compte Instagram réunissant 300 abonnés glorifiant leur travail, n’ont rien compris. A partir du moment où on propose une prestation payante, ces fameux « abonnés » ne seront plus aussi nombreux à venir vous voir et se transformer en client. Ils continueront pour autant  à consommer vos images sur le web.

Pour juger de la réelle qualité de votre travail produit adressez-vous à des photographes réellement expérimentés, des gens qui sauront vous dire clairement les choses. Et s’il vous plait ne vous vexez pas si parfois les réactions sont brutes. S’installer comme entrepreneur c’est une aventure difficile, mais être un bon technicien photographe est aussi une étape.

On ne vit pas chez les bisounours d’une part, et d’autre part vous pouvez tomber de haut et vous faire mal. Et oui les groupes de discussions sur les réseaux et insta sont peut être « super fan » de votre production car « waw c’est trop dingue » mais en échange demandent la même manœuvre en retour : « tu t’abonnes à mon compte je fais pareil ». Cherchez la logique.

Mais la réalité c’est que le travail que vous pensiez à la hauteur ne sera pas forcément ce que vous allez entendre auprès de gens réellement compétent en la matière (ah wais mais ils sont trop rageux les pros pasque en fait ton travail il est trotrop bien quoi => ah bon et tu payerais pour ce travail ? => Ah ben en fait heu….). Donc c’est comme pour la création d’entreprise. En photo comme en création on s’adresse à de gens avec des compétences pour faire évaluer son portfolio.

Travaillez, formez-vous, soyez exigeant jusqu’à obtenir une qualité de production forte et impactante. Si vous conservez un niveau moyen voire médiocre vous serez noyé dans la masse des autres photographes qui évoluent dans cette catégorie. Entreprendre c’est aussi tirer sa production vers une qualité haute pour ainsi perdurer dans le temps et vivre de cette activité avec des tarifs en adéquation avec vos compétences.

Ne pas négliger les activités annexes

Vivre de la photo c’est aussi comprendre que sa spécialisation, ici en exemple l’animalier domestique et équestre ne suffira pas parfois à boucler le mois. Il faudra donc apporter des services supplémentaires à sa clientèle. Des activités qui assureront une plus grande rentabilité horaire : photo d’identité, mariages, tirages, scolaire etc. Pensez-y lorsque vous aurez fait vos calculs. Si on reprend l’exemple précédent de 16 séance mensuelles, que vous n’arrivez pas à réunir ce nombre chaque mois (y compris l’hiver donc), que même en le réduisant et en augmentant proportionnellement le tarif de séance vous n’avez pas plus de client il va donc falloir trouver d’autres moyens de rentabiliser votre activité. Pensez-y 😉

Pour conclure sur la rentabilité de son entreprise de photographe

Même si c’est approximatif, que les chiffres donnés sont faux, exagérés etc. Vous aurez désormais des pistes de réflexions pour vous aider à comprendre comment rentabiliser votre activité et de ce fait créer votre grille de tarifs pour les séances photos. Chacun aura forcément des calculs différents en fonction de ce qu’il souhaite dégager mensuellement et si c’est une activité principale ou secondaire. Je le rappelle ce n’est pas un article où vous allez trouver des infos toutes cuites pour faire vos tarifs de photographe. A chacun de se prendre par la main et poser les choses sur le papier. Et ainsi créer une entreprise conforme à son image et ses attentes. Bon courage !


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