Le photographe et l’insatisfaction, un mal courant

Depuis un certain temps j’ai l’impression de lire partout des remarques de photographes qui passent leur temps à se flageller, à parler d’insatisfaction. Je parle là souvent non pas forcément  de photographes aguerris, ou de ceux qui sont bien au-dessus du portfolio de base (rassurez vous perso je n’en suis pas rendu là non plus). Je parle plus de cette génération qui émerge, qui se cherche en photographie. Souvent formée à l’école des réseaux sociaux et de Youtube, des formations en ligne voire de l’auto didactisme complet.

Entre recherche de bien-être et d’estime beaucoup de photographes viennent dès les premières phrases vous expliquer que leurs travaux ne les satisfont pas, qu’ils n’arrivent à rien, que c’est loin d’être comme X qui est trop un photographe de talent. X étant parfois le moteur visuel d’un groupe de photos sur les réseaux sociaux porté aux nues par ses membres. X n’étant juste que le photographe le plus abouti de son groupe, mais de très loin l’expert que l’on imagine. Forcément vivre et mourir dans un microcosme fermé ça n’aide pas. Mais on a aussi l’inverse où X est un pur talent visuel. Sauf que X a bossé dur, et bouffé des milliers d’heures à progresser, avancer, refaire, recommencer.

Les réseaux l’ennemi du bien pour le photographe

Comme expliqué les groupes sur les réseaux sociaux ont tous un énorme défaut : souvent une communauté qui se ferme sur elle-même et se fond dans un modèle type. On rejette la vilaine critique méchante et abusive. On vénère la bienveillance plus que positive à en vomir du bisounours et des paillettes. On ne dit jamais de mal, on amène légèrement quelques défaut mineurs mais surtout on congratule, on vénère même…. Si c’est de l’a daube.

Le premier qui s’essaie à une critique, sans pour autant en dégager des mots violents, haineux ou insultant, et qui apporte une analyse claire est souvent conspué. Trop négatif, dur, non constructif. En clair c’est d’la merde mais on n’a pas droit de le dire.

Progresser c’est aussi s’entendre dire ouvertement que son cliché est à refaire : compo, lumière et j’en passe les raisons sont multiples. On a TOUS fait des conneries, on a TOUS faite des erreurs de débutant, on fait TOUS encore des conneries. Mais la critique sert à les gommer, les raser, et avancer vers la sainte progression. Travailler dur, pratiquer beaucoup pour avancer et atteindre un niveau de maitrise progressif. Et des paliers il y en a un paquet.

Donc les réseaux c’est bien mais il faut fuir ces endroits où l’excuse futile du « mais on est des amateurs », « on est bienveillant » et j’en passe. On peut être constructif, apporter un réel apport pour chacun à partir du moment où on est en mesure d’ACCEPTER qu’on fait des erreurs. Et que non la photo de Pouf le chat cadrée à l’arrache et sa ribambelles de clichés en rafale mis ensemble est ratée. On analyse, on cherche, jusqu’à comprendre où on a foiré, comment y remédier puis on recommence. Le début de l’insatisfaction est là : pas de progression réelle ou du moins pas de repère ou de jalon permettant de se placer.

La critique trop bienveillante des photographes, un échange donnant donnant

Un autre gros souci sur les réseaux c’est cette critique bienveillante et bourrée de guimauve. Cette critique qui au final n’est pas gratuite. L’un valide et s’extasie, mais espère au fond de lui recevoir le même retour enthousiasme. C’est tout sauf constructif. Si vous ne savez pas, si vous ne comprenez pas laissez les personnes qui maitrisent vraiment apporter leurs connaissances. Assumez d’apprécier l’image, mais ne venez pas conspuer ceux qui vont apporter une expertise (une vraie pas les ceux qui savent). Vous êtes insatisfait parce que vous vous cherchez, vous progressez. Mais pour avancer, réellement il faut comprendre où on merde, où est ce qu’on est pas bon. Sinon reproduit toujours les mêmes erreurs.

Le photographe et sa soit disant vision artistique

Là aussi grand moment de solitude parfois quand on demande à quelqu’un l’intérêt ou la démarche derrière son image. Parfois au lieu de répondre juste : je trouvais ça esthétiquement joli, ou encore reconnaître que l’intention est inexistante, ou encore cacher une photo foireuse derrière un pseudo intention artistique dénuée de sens c’est encore pire. Les excuses ne cacheront jamais un raté. Et votre égo blessé par les remarques s’en remettra.

J’ai moi-même un paquet d’image vides de sens et réalisées juste parce qu’elles m’ont plus visuellement. Où est le mal ? J’assume… Après il y en a d’autre où j’ai des intentions. Mais je ne vais pas me vexer si je me trouve pris de court et que je n’ai pas réfléchi au sens de la photo que je viens de faire avant de le réaliser. Et je ne vais pas non plus inventer un truc bidon si j’ai foiré ma photo et pour compenser. Se cacher derrière un excuse d’intention bidon pour dissimuler une photo ratée c’est ne pas assumer. Et pareil ça ne vous fera pas progresser donc avancer donc vous satisfaire.

Les ceux qui savent et les réseaux : votre ennemi

Vous êtes en phase de progression, vous êtes désormais armé contre le monde bisounours des réseaux. Vous êtes prêt à encaisser les critiques et à assumer que vos premières photos durant quelques temps voire longtemps seront tout sauf intéressantes, construites, réussies et j’en passe. Mais vous avez envie de réussir. Mais il reste un ennemi insidieux plus difficile à éviter, à détecter : « ceux qui savent ». Ils « sachent » tout ! Donnent leur avis sur tout, critiquent tout. Mais quand on creuse un peu : portfolio vierge, maitrise inexistante, ou s’imagine « Artiste » sans pour autant avoir une once de maitrise à maturité.

L’expert ou du moins celui qui a un peu de connaissance, de maitrise ça se voit. Mais vraiment. Et quand il vous balance un exemple de son boulot vous comprenez vite. Il sait aussi se taire quand il ne sait pas et laisse la place à ceux qui détiennent le savoir sur un sujet. C’est ça aussi la progression : savoir se placer et apporter ce que l’on sait, céder sa place et reconnaître sa méconnaissance. Mais quand il vous conseille prenez le temps, l’humilité de lire, écouter, comprendre et appliquer. il est passé par là avant vous si ça peut vous rassurer.

C’est aussi une manière d’enrichir sa culture technologique, photographique ou autre. Et apporter son savoir sur le sujet où on a de l’expérience solide. Quand ne sait pas on ne se prononce pas.

Moi perso parler de technique de photo d’oiseau je ne maitrise pas. Comme je ne maitrise pas l’argentique, ni encore le moyen format, ou encore la critique photo où je ne me sens pas assez crédible.

Le syndrome de l’imposteur l’excuse devenue fourre tout

Le syndrome de l’imposteur chez le photographe c’est devenu à cause de tout ça un terme  fourre-tout. Une excuse idéale chez nombre de photographes dit « pro ». Ces « pros » qui se sont lancés après 6 moins de pratique et ne se sont toujours pas rendu compte que la photo c’est plus compliqué que ça ne semble être. Mais ce syndrome de l’imposteur devient une excuse pour ceux qui pensent : ne pas arriver, Que leurs photos c’est pas ça, Qu’ils ne sont pas satisfait, qu’il n’arriveront jamais à rien

Pour rappel

Les personnes atteintes du syndrome de l’imposteur, appelé aussi syndrome de l’autodidactephénomène de l’imposteurexpérience de l’imposture, expriment une forme de doute maladif qui consiste essentiellement à nier la propriété de tout accomplissement personnel. Ces personnes rejettent donc plus ou moins systématiquement le mérite lié à leur travail et attribuent le succès de leurs entreprises à des éléments qui leur sont extérieurs (la chance, leurs relations, des circonstances particulières). Elles se perçoivent souvent comme des dupeurs-nés qui abusent leurs collègues, leurs amis, leurs supérieurs et s’attendent à être démasquées d’un jour à l’autre.

Wikipédia

Plusieurs possibilités de cas de figure

  • Le photographe en cours d’évolution. Il n’a pas notion de la courbe de progression qui monte, chute, remonte, stagne en haut, rechute etc. Cette courbe est idéale pour mieux appréhender le cheminement de chaque photographe.
  • Le photographe qui cherche de l’estime, de l’approbation, des tonnes d’abonnés sur ses réseaux. Le problème n’est pas alors forcément en photo.
  • Le photographe professionnel / passionné ET expérimenté mais insatisfait : celui-là c’est le profil type. Il maitrise sa partie technique (du moins bien assez en général), car il a atteint un bon niveau de maitrise. Mais il reste accroché à cette insatisfaction qui le bouffe. Là ce n’est plus juste les potes, la famille, les réseaux qui lui disent que son boulot est bien, et intéressant mais vraiment un sentiment général et partagé. Via les expositions, les publications, les échanges avec des photographes reconnus et j’en passe. On va aussi trouver celui qui est un excellent technicien mais se cherche encore, n’a pas trouvé le style qui va lui correspondre au point que ça devienne naturel, automatique.

Sachez que ça évolue, en bien, avec le temps mais que ça ne disparais pas toujours. Pour ma part je l’ai toujours mais je le vis mieux au fur et à mesure que je prends de l’assurance donc de la maitrise. Parce que j’assume mes choix, mes compositions, ma façon de faire, de traiter mes images.

Oui je suis fan de la maitrise de certains de mes consœurs ou confrères mais quand j’essaie de l’appliquer à moi ça ne fonctionne pas. Désormais je l’ai compris, assumé et je sais que ce n’est pas ma façon de faire. J’ai trouvé ma voie, mon style, ma manière de travailler.

Photographes arrêtez de vous faire du mal ! L’insatisfaction c’est normal

Donc ne vous faites pas trop de mal. Acceptez de flotter, d’être indécis, de ne pas être sûr, de douter, de vouloir recommencer. Parce que le cycle de la création c’est aussi ça. C’est avancer pas à pas pour atteindre enfin SON univers à soi et en être pleinement satisfait. Mais cela implique avant tout de comprendre, et savoir-faire, d’avoir accumulé des milliers d’heures à avancer, chercher, essayer.

Un photographe qui veut réussir en 3 mois ce que d’autres ont mis une vie à réussir c’est compliqué. Alors apprenez le secret de la réussite : patience et persévérance… Pas besoin de vous laminer et vous flageller si vous pataugez… C’est normal. L’insatisfaction fait partie du processus. Continuez à vous tirer vers le haut. Soyez attentif aux conseils trop bienveillant et écoutez les gens qui vous orientent sans avoir un intérêt final qu’il soit marketing (je te passe de la pommade mais je vais te transformer en client) ou les intéressés (azy je dis du bien de ta photo et tu t’abonnes à compte insta).

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